Hommage à Philippe Olivier

Discours de Claude Maret lors des obsèques de Philippe Olivier qui se sont déroulées le mardi 20 décembre 2022.

Cher Philippe,

Il y a 4 mois, tu m’as fait le bonheur de me remettre la légion d’honneur, une récompense qui mettait à l’honneur notre profession de crémier-fromager.

Aujourd’hui, par ce discours, en tant que Président de la Fédération des Fromagers de France, c’est toute la filière qui tient à te mettre à l’honneur car si notre profession en est là aujourd’hui, elle le doit en grande partie à des gens comme toi.

En effet, par ta volonté, tu t’es imposé comme le garant de la nouvelle identité fromagère traditionnelle en faisant évoluer le métier de crémier-fromager détaillant avec 2 axes principaux : le produit et la communication.

Juste quelques petits mots concernant ton parcours et qui montrent ton chemin pour arriver à ce que tu étais.

Tu es né dans une famille d’épiciers normands où la bonne chère était reine et le fromage roi depuis 1907. A ta majorité tu décides de poursuivre la filiation et de devenir Fromager.

N’étant pas l’ainé de ta fratrie, tu n’étais pas prioritaire pour reprendre l’affaire familiale dieppoise. Tu pars en apprentissage à Paris chez Monsieur et Madame BOST, rue Clerc puis à Cannes chez Monsieur et Madame CENERI.

Après ce tour d’horizon, tu prendras une décision radicale : créer une fromagerie à Boulogne sur mer alors que tu n’avais aucune attache, juste une très bonne intuition.

La fromagerie OLIVIER verra le jour le 13 décembre 1974, rue Adolphe THIERS.

Ton premier axe : développer des productions fromagères locales. Là aussi, tu as été un précurseur. Tu vas ainsi contribuer à faire renaître en collaboration avec des agriculteurs, les fromages du Nord.

Ensuite, ce fut la diffusion auprès des autres crémiers avec dans chaque expédition ta note appelée « les news », pleine de conseils et d’humour.

Puis tu vas toucher la restauration avec un but : que les restaurateurs mettent mieux en avant le fromage.

Ensuite, ce fut l’exportation avec en même temps les conférences fromagères qui t’amèneront notamment jusqu’au Japon et en Polynésie française.

Les buffets de fromages seront ta signature et par exemple ceux consacrés aux fromages du nord dans les salons d’honneur du Sénat resteront d’anthologie.

Tu t’intégreras vite dans le collectif d’abord dans le paysage économique boulonnais avec la Présidence du centre des jeunes dirigeants d’entreprise de la côte d’opale puis à la CCI Boulogne côte d’opale.

Tu seras très vite intéressé par l’esprit de compagnonnage et l’entraide au niveau de la profession. Tu seras ainsi un membre actif de la Guilde internationale des Fromagers sous l’impulsion d’un de tes mentors, Pierre ANDROUET.

Dans sa veine, tu as acquis une culture immense sur l’histoire et les traditions fromagères. Tu seras ainsi un fabuleux conteur de notre gastronomie lactée et tes conférences fromagères ont largement passionné leurs auditeurs jusqu’à créer des vocations. Ta carrure et ton charisme ajoutaient de la dimension à cette stature.

Tu créeras aussi un club de réflexion, d’expérimentation et t’entraide, le cercle des fromagers affineurs avec des professionnels amis.

En 2010, tu prends la présidence de la fédération des fromagers de France malgré la maladie qui débute.

Tu vas accompagner le renouveau de notre profession qui commence à se manifester avec l’évolution en magasin du vendeur qui devient vendeur-conseil et les reconversions professionnelles qui s’accélèrent.

Le point d’orgue en furent les Assises de la profession en 2012 à Paris qui marquèrent toute une génération de professionnels et permirent de valider des perspectives.

Petite parenthèse, il était prévu que tu fasses l’ouverture de nos futures assises, le Printemps des fromagers prévu à Reims les 26 et 27 mars. Nous aurons une pensée pour toi.

Tu as été élevé au grade de Chevalier de l’Ordre de la Légion d’Honneur, Officier de l’Ordre du Mérite Agricole et Chevalier de l’Ordre National du Mérite.

Après ton retrait de la fédération en 2015 et la reprise de ton affaire par ton fils Romain dont tu étais très fier, tu consacrais une partie de ton temps à l’écriture mais par des appels réguliers avec David, notre Délégué Général ou moi-même tu restais près du métier qui était un des sens de ta vie.

Durant toute ta carrière, tes engagements professionnels et ensuite, face à la maladie, tu seras épaulé par Brigitte, ton épouse, « ton rayon de soleil » comme tu aimais le dire.

Je terminerai juste par une phrase dont tu es l’auteur et qui est devenu notre devise : « Pour que les bons fromages restent entre de bonnes mains ».

Merci Philippe pour tout ce que tu as construit.